Notes sur l'agressif Drosera burmanni (Filippo TASSARA)(Traduction libre de Christina PEDRI)
Publié dans le bulletin de l'Association italienne, AIPC News,
vol.2 n°4, octobre 1999.
Comme beaucoup de gens savent, et les passionnés de plantes carnivores
d'autant mieux, même les plantes peuvent se mouvoir. Ceci est évident pour la
dionée et pour Aldrovanda, un peu moins pour les genres Utricularia, Drosera
et Pinguicula.
Les deux derniers genres sont en fait souvent très lents dans leurs
mouvements et le phénomène ne s'observe qu'une fois accompli, lorsque nous
voyons les proies enserrées par les feuilles dévoreuses.
Cependant, au moins pour le genre Drosera, il existe des exceptions : une
de celles-ci est représentée par Drosera burmanni, petite plante annuelle, peu
exigeante, qui croît naturellement dans une vaste région comprenant l'Inde, la
Chine, le Japon, l'Asie sud-orientale et une partie de l'Australie. En particulier
en Australie, elle réussit à pénétrer vers l'intérieur, dans une région
normalement aride, où l'humidité est présente pendant une période très courte
de l'année. Elle pousse alors rapidement, fleurit et produit des graines qui
survivront à la plante mère dans l'attente de nouvelles pluies.
A sa base, elle est constituée d'une rosette de feuilles pétiolées et arrondies
couchées sur le sol; les tentacules périphériques sont plutôt longs et leur base
est plate et large. Ceux-ci, comme pour toutes les plantes du genre Drosera,
sont dotés de la possibilité de se mouvoir : s'ils sont stimulés mécaniquement
ou chimiquement, ils se replient sur eux-mêmes de façon à amener la partie
apicale au centre de la feuille, où se trouve le liquide gluant. Là sont situées les
glandes destinées à la digestion de la proie et à l'absorption des substances
utiles (la forme concave de la partie centrale de la feuille favorise
l'augmentation de la surface de contact entre les glandes et la proie).
La partie apicale des tentacules marginaux de Drosera burmanni est formée
par une structure allongée, juste légèrement collante et incomplètement
recouverte de liquide adhésif : c'est la partie qui réagit aux stimuli mécaniques
et chimiques.
Ce qui surprend le plus dans cette espèce, c'est la rapidité du mouvement, nettement visible à l'oeil nu, inhabituel pour un droséra. Les tentacules ne réagissent pas immédiatement au stimulus, mais attendent quelques instants avant de commencer à bouger. Pour les autres droséras, cette phase dépasse habituellement les trente secondes, mais pour Drosera burmanni, les tentacules peuvent "partir" après seulement 5 secondes (pas toujours : cela dépend des conditions de la plante et de la température). Le mouvement se produit en deux phases : la première, rapide, pendant laquelle le tentacule parcourt un arc de plus de 90°, puis une autre, plus lente, qui l'amènera à s'appuyer au centre de la feuille. Pour la plupart des droséras, la première phase dure au moins 30-45 secondes, alors que la seconde est en général beaucoup plus lente. S'il se trouve dans de bonnes conditions, Drosera burmanni met en revanche environ 5 secondes à plier le tentacule et, après une brève pause, cinq autres à le positionner. Cette incroyable vélocité permet à la plante d'avoir le maximum d'efficacité sur les proies importantes qui, si elles disposaient de plus de temps, réussiraient sans trop de problèmes à se libérer du liquide adhésif : il n'est pas rare qu'elle réussisse à capturer jusqu'à des animaux de la grosseur d'une grosse mouche, ce qui est exceptionnel pour une plante de dimension aussi modeste.
Il semble que même Drosera sessilifolia
(plante pratiquement identique à Drosera
burmanni, mais qui vit en Amérique du
Sud) et Drosera glanduligera (d'Australie)
ont ces particularités de vitesse de
mouvement. Leurs tentacules marginaux
ont la base aplatie et élargie comme ceux
de Drosera burmanni.
Fernando Rivadavia a signalé le cas
d'une grenouille piégée d'une patte par une
feuille de Drosera sessilifolia : il s'agit
peut-être du premier cas répertorié d'un
vertébré capturé par un droséra (pour ceux
qui aiment les histoires dont la fin est
heureuse, la grenouille a ensuite été libérée).
La culture de Drosera burmanni est plutôt facile (et donc beaucoup plus
facile que celle de Drosera glanduligera et Drosera sessilifolia) : elle exige un
climat tempéré chaud (la plante vit en fait dans les zones tropicales) et une
exposition ensoleillée; un mélange de tourbe et sable lui convient comme
substrat, dans n'importe quelles proportions et tenu constamment humide.
En général, les plantes meurent après la floraison, mais elles peuvent être
sauvegardées et régénérées si on enlève les feuilles sèches de la base de la
plante qui empêchent les nouvelles racines de rejoindre le terrain.
La reproduction par semis est donc le moyen le plus simple et naturel pour
la maintenir en culture.
DIONÉE 45 - 2001 |