Les mouvements rapides du piège chez Dionaea muscipula

(Geoff FINDLAY)

Traduit par Isabelle FRÉMON

Article paru dans Bulletin of Australian Carnivorous Plant Society, vol. 19, n°2, juin 2000. Son auteur est un éminent chercheur au Département des Sciences Biologiques de l'Université de Flinders (Australie). Il a étudié les mouvements chez les végétaux pendant plusieurs années et nourrit un intérêt particulier pour Stylidium.

Fortuitement, cet article servira ici de complément à celui de Laurent Legendre, en offrant une interprétation légèrement différente du processus.


La rapide fermeture du piège de la vénus attrape-mouches peut être considérée en termes de trois étapes :

  1. La transduction du stimulus (le toucher d'un ou deux cils par un insecte) changé, de façon bien définie, en une différence électrique potentielle à travers les membranes cellulaires des lobes du piège. Ce changement (le potentiel d'action) est similaire au changement que constitue l'influx nerveux dans les cellules nerveuses.


  2. La propagation de la réponse correspondante des cils aux cellules motrices du piège. Peu d'échanges de travaux ont été faits à ce sujet, mais il semble que la transmission du potentiel d'action de cellule à cellule est électrique. Le courant électrique, se propageant à travers les membranes cellulaires, provoque une modification dans les membranes des cellules voisines, et si ce changement devient assez conséquent, un potentiel d'action se crée dans cette cellule, et ainsi de suite, jusqu'à ce que le potentiel d'action arrive aux cellules motrices, probablement à l'intérieur ou proches de la charnière du piège, responsables du mouvement (cf. Simons, 1981).


  3. La fermeture proprement dite du piège. Le Dr Bruria Hill du Département de Physiologie de l'Université de Cambridge, qui était avec moi à l'Université de Flinders, s'est penchée sur le problème, mais était incapable de déterminer exactement quelles cellules étaient impliquées. Mais aussi loin que nous pouvons chercher, et basés sur ce qui est une petite évidence, il semble que lorsque le piège est ouvert, les cellules proches de la charnière et celles de la face interne ont une plus grande pression hydrostatique interne que les cellules de la face externe du piège. Cette plus grande pression hydrostatique (ou pression turgescente) cause un élargissement des cellules internes tout en laissant les cellules externes en l'état, de sorte que les lobes se tiennent écartés.

La pression turgescente des cellules végétales est maintenue par la présence de solutés, principalement des sels de potassium, à l'intérieur de la cellule. Ces solutés sont transportés dans la cellule à travers la membrane externe, la membrane plasmatique, par des protéines qui agissent comme des pompes à ions et solutés. Alors que la cellule doit elle-même pomper, sa paroi s'étire et son volume augmente. Quand les solutés sont partis, la pression turgescente baisse et la taille de la cellule diminue (cf. Taiz & Zeiger, 1998).

Chez Dionaea, quand les potentiels d'action atteignent les cellules motrices, ils causent un potentiel d'action au sein même de ces cellules motrices, avec pour conséquence de cette modification une perte de solutés dans ces cellules. Il est supposé que cette perte de turgescence se produit uniquement dans les cellules internes, et ainsi les lobes du piège conduits par les cellules externes, bougent ensemble.

C'est essentiellement l'"opinion classique" sur le fonctionnement des tissus moteurs de la plante, et il est évident que ce type de mécanisme est à l'origine du mouvement diurne des feuilles, ainsi que celui des stomates (cf. Hill & Findlay, 1981).

Quoi qu'il en soit, il y a également la théorie, proposée par Williams et Bennet (1982), selon laquelle la fermeture du piège s'avère une réponse sous forme de croissance rapide. Dans cette explication, il est avancé que les cellules motrices de la face externe augmentent de taille très rapidement dans un processus de croissance, et ainsi provoquent le mouvement des deux lobes du piège. J'ai de grandes difficultés avec cette explication car la réelle vitesse de croissance nécessaire pour fermer le piège est de 200 millisecondes. Il est plus acceptable d'envisager une perte de volume des cellules de la face interne par une perte d'eau et de solutés, à cet instant.

Dans la première explication, le changement de taille de la cellule motrice est causé par le mouvement des solutés et de l'eau et non par un changement dans la masse et les propriétés de la paroi cellulaire. Plutôt comme le gonflement d'un ballon. Dans la seconde explication, où la croissance est impliquée, la cellule pomperait les ions hydrogène de l'intérieur vers l'extérieur et l'abaissement du pH provoquerait dans la paroi la cassure des liens chimiques lors de son étirement. La cellulose augmenterait alors dans la cellule pour combler les fissures. C'est essentiellement un processus plastique. Quand la pression turgescente baisserait, il n'y aurait qu'un léger changement de volume en raison de l'addition de nouveaux éléments.


Références :

  • HILL, B.S. & FINDLAY, G.P. (1981). «The role of movement in plants : the power of osmotic machines». Quaterly Reviews of Biophysics 14, 173-222.
  • SIMONS, P.J. (1981). «The role of electricity in plant movements». New Phytologist 87, 11-37.
  • WILLIAMS, S.E. & BENNET, A.B. (1982). «Leaf closure in the Venus flytrap and acid growth response». Science 218, 1120-1121.
  • TAIZ, L. & ZEIGER, E. (1998). «Plant Physiology» (2nd edition) Sinauer Associates ; Sunderland, Massachussets.


DIONÉE 45 - 2001