Nouvelles découvertes et habitats de PINGUICULA au Mexique (Dr A. LAU, 2nde conférence de l'ICPS, Bonn, Allemagne, 1998)
Traduction libre E. PARTRAT
C'était en 1974 lors d'une excursion sur la plus haute montagne
de l'état d'Oaxaca, Le Cerro Zempoateplt. Nous franchissions de
nombreuses petites élévations qui étaient recouvertes d'une
magnifique mousse jaune, sans doute de la même famille que le
sphagnum.
Hors de cette mousse, pointait une fleur de type Pinguicula
moranensis d'une couleur rouge sombre, la seule fleur véritablement
rouge d'un groupe dont la majorité des fleurs est plutôt dans la
gamme des violets. Elle pousse à 2300m d'altitude sous des pins et
des chênes, sur des parois verticales ressemblant à de véritables
murs.
Plusieurs années plus tard lors d'une visite de Franz FUCHS de
Linz, Autriche, ce dernier est resté en admiration devant un mur de
mon jardin qui était couvert de nombreux spécimens de cette plante.
Quelques années encore plus tard, lors d'une conférence à Birmingham,
Angleterre, ces plantes se vendaient pour 16£ !. Le Dr Franz SPETA
a publié la plante sous le nom de Pinguicula laueana.
En continuant sur la route qui va de Cerro Zempoateplt à Zaratoga,
nous avons examiné un gigantesque rocher dans un des virages de la
route poussiéreuse. Un de mes garçons m'a montré une plante lointaine
ressemblant à une PINGUICULA mais qui n'était pas Pinguicula laueana.
Sans équipement de grimpe adapté, nous n'avons malheureusement pas pu
nous en approcher et avons du abandonner notre découverte potentielle.
A Santa Maria Yucuhiti, proche de Santiago Nuyoo, Oaxaca, il y a
une localité sur laquelle on trouve un gigantesque rocher triangulaire
de granite qui abrite trois différentes espèces de PINGUICULA, chacune
se partageant une face. Pour rejoindre ce site, il faut atteindre une
altitude de 3000m. La zone est souvent recouverte par du brouillard.
Une splendide forme couvre de façon dense la face sud-est, les feuilles
aussi bien que les fleurs avec long éperon, d'une autre couleur rouge.
Quelques-unes des fleurs tendant même vers le cramoisi. Quelques
vieilles feuilles de chêne recouvrent certaines plantes. La face nord
est couverte d'une forme de Pinguicula moranensis alors que la face
sud-ouest abrite une espèce difficile à définir, P. mirandae ? avec des
fleurs blanches et des reflets violet pâle (purple) en bordure. Les
rosettes hivernales sont assez petites, presque invisibles, mais quand
la saison des pluies arrive, en Mai/Juin, elles triplent pratiquement
de taille et sont recouvertes de multiples proies. Pas très loin, près
de Yosundua, pousse une Pinguicula à feuilles très fines, qui à la
particularité de former de nouvelles plantes à l'extrémité des feuilles.
Je n'ai pas encore vu les fleurs de cette plante. Au cours de la phase
d'hibernation, les vieilles feuilles sèches subsistent, attachées
encore à la rosette d'hiver.
Sur la route de Jalapa de Diaz à Ayautla, nous avons vu de nombreuses
taches jaunâtres qui parsemaient au loin le talus. Oaxaca nous réserve
encore des surprises !. Avec mes jumelles, j'ai pu reconnaître qu'il
s'agissait d'une PINGUICULA mais par contre d'une taille impressionnante,
poussant en petits groupes, au milieu d'agaves et de Tillandsia
streptophylla. Elles poussent sous le chaud soleil tropical sous une
pleine exposition. Nous avons grimpé le long du talus et pris des photos
suivant de nombreux angles. Nous avons alors constaté que le dessous des
larges feuilles servait aussi à la capture des insectes tout comme la
face supérieure. Dans la nature, elles poussent à une altitude de 350 m
environ. Les parois sont tellement couvertes de cette population de
PINGUICULA qu'elles sont jaunâtres. Cette espèce a depuis été décrite
il y a peu sous le nom de Pinguicula gigantea.
P. orchidioides abonde dans la Sierra de Juarez, Oaxaca. Il est aussi
facile en culture, tout en préférant des conditions fraîches. Sur la difficile
route menant vers Dulces Nombres, qui commence à Santa Engracia au Taumalipas,
à une altitude de 2000 à 2500 m on trouve l'habitat de Pinguicula cyclosecta.
Ces plantes couvrent complètement et entièrement les rochers et collines.
Les collines de gypse représentent un site primordial pour trouver de
nouvelles espèces de plantes. Près de Juxtahuaca dans l'état de Oaxaca,
par exemple, il y a une importante colline de gypse de 1500 à 2000 m au
dessus du niveau de la mer qui se trouve près d'un lac très profond. Quand
la saison des pluies commence, il y a des milliers et des milliers de
Pinguicula heterophylla à feuilles étroites qui en jaillissent. Les fleurs
de Pinguicula heterophylla ont les bords violet (purple). Elles sont
difficiles en culture.
Près de Concepcion Papalo, dans l'état de Oaxaca et près de Canoas,
Durango, à 2700m sur de l'argile (terre glaise ?), j'ai rencontré une
autre forme de Pinguicula heterophylla. Dans une autre région proche de
Zaragoza, Nuevon Leon, à 1500m d'altitude, on trouve d'adorables petites
plantes aux rosettes succulentes. Les fleurs de couleur blanche sont plus
larges que l'ensemble de la rosette. Il s'agit de Pinguicula immaculata.
Près de Novillo, Tamaulipas, sur une colline très isolée, dans un sol
argileux, sous des pins, pousse une PINGUICULA, que je suppose être
Pinguicula lilacina. Je n'ai jamais trouvé trace de la plante durant
la saison sèche et je me demande si cela ne pourrait pas signifier qu'il
s'agit d'une espèce annuelle.
C'est la même constatation pour cette nouvelle découverte dans le
site "Pine Ridge" au Belize. Cette dernière est maintenant étudiée. Cette
petite Pinguicula à fleurs blanches pousse en compagnie de Utricularia
hispida et Drosera brevifolia. La zone se trouve à une altitude de 1000m
d'altitude dans un marais humide.
L'un des paysages le plus beau de toute l'Amérique Latine est la
Sierra Obscura de Chihuahua mais y arriver est pratiquement impossible. Le
temps doit être sec. J'ai pourtant pu m'y rendre en 1972. La vue offerte est
magnifique. Pratiquement toutes les plantes rencontrées, poussent suspendues,
car il n'y a pas de sol horizontal. Sur une paroi en permanence humide, avec
un sol "crayeux" jaunâtre avec Tacitus bellus (Graptopetalum bellum), pousse
une très intéressante Pinguicula. Nous n'avons jamais pu cultiver cette
Pinguicula même dans son propre substrat. Un ami en Australie, M. Bond,
l'a tenté in vitro et y a réussi. Il semblerait que cette magnifique
Pinguicula n'ait jamais été décrite. De longues feuilles brunes et des
fleurs violet pâle (purple) lui permettent de se distinguer entre toutes
les autres espèces du genre.
Pinguicula reticulata qui est facile à cultiver et qui fleurit
facilement, pousse dans des conditions semi-désertiques près d'Ascension,
Nuevo Leon, à 2300 m d'altitude. J'ai trouvé une autre Pinguicula dans la
Sierra Huichol à Nayarit mais je ne la connais pas.
Dans la région autour de Buenavista, dans l'état de San Lui Potosi,
j'ai trouvé des plantes que j'ai réussi à identifier en tant que Pinguicula
takakii. Entre des spécimens étranges de Selaginella, près de Buenavista,
San Lui Potosi, Pinguicula gypsicola abonde. De jolis spécimens de
Pinguicula agnata poussent à 3000 m d'altitude sur des roches granitiques
dans la Cerro del Viejo, en bordure de Tamaulipas et Nuevo Leon.
Le désert de la Sierra Salamanca est une autre localité qui abrite
une population de Pinguicula esseriana en condition de croissance en
semi-ombre. On rencontre très régulièrement dans la Sierra de Tamaulipas,
même si elles sont difficiles à atteindre, une espèce de Pinguicula
(Pinguicula rotundiflora) qui est très facile à faire pousser et à
faire fleurir. Les fleurs très abondantes, sont en extrémité d'une
longue tige, elles sont pratiquement blanches avec quelques veines
violettes (purple).
La plupart des populations de PINGUICULA rencontrées se confinent
à une altitude de 2000 à 3000 m sur une zone comprise entre la bordure
de Chihuahua-Sonora à Oaxaca (et le Chiapas, continuant au Guatemala
et au Belize) et entre Jalisco à l'Ouest au Tamaulipas au nord-est.
Les botanistes découvriront certainement encore bien d'autres espèces
au Mexique encore inconnues et non décrites.
DIONÉE 42 - 1999 |