Pinguicula lusitanica

(Eric PARTRAT)


Pinguicula lusitanica est une charmante petite grassette vivace mais de longévité médiocre, ne supportant pas en effet que l'on touche à ses racines ou que l'on change ses habitudes. J'ai eu un peu de mal à maintenir les deux splendides pieds adultes que j'avais reçu de chez « Nature et Paysages ». J'avais suivi pourtant les conseils de la littérature en ne touchant pas les plantes et en maintenant une bonne humidité atmosphérique. Les grassettes qui devaient certainement regretter le climat des serres du sud-ouest de la France et les soins expert de J.J. LABAT ont dans un ultime instinct de conservation, cherché à se multiplier en érigeant chacune une timide et maladive hampe florale. Les gousses de graines et le nombre de graines à l'intérieur (respectivement 1 et 3) m'ont immédiatement replongé dans la littérature pour savoir si je ne m'étais pas trompé en lisant dans le livre (bible) bien connu d'Adrian Slack que les fleurs étaient fécondées naturellement. Cette expérience a eu lieu il y a plusieurs années mais elle laisse un souvenir amer lorsque l'on passe une nouvelle commande pour renouveler l'expérience. Cette fois, j'ai complété ma bibliographie par la lecture et la photo de l'article du DIONEE N 15, mais aussi une petite phrase pas si anodine que cela dans la revue n 4 de l'IPSG (International Pinguicula Study Group) et dans l'article de M. Miloslav Studnicka sur les « difficiles Pinguiculas » et en particulier sur Pinguicula lusitanica : (traduction sans prétention).


« Je n'ai jamais réussi, la cultivant seule dans un pot avec de la tourbe humide, comme les Droséras. Une fois, j'ai semé P. lusitanica dans un pot avec un Sarracenia imposant. J'ai observé comme une symbiose. Il y a maintenant une abondante population de Pinguicula lusitanica au milieu de ma population de Sarracenia qui est cultivé bien humide toute l'année. Toujours est-il que j'ai mesuré ma plus grande Pinguicula lusitanica (47mm) installée sur un film d'eau où pousse Utricularia gibba. Gardez la grassette comme une mauvaise herbe et elle poussera aussi facilement qu'une mauvaise herbe ».


C'est un rêve que j'aimerais bien réaliser mais comme d'une part je suis nettement plus intéressé par la culture des grassettes que de celle des Sarracenias et que d'autre part, les sites à grassettes du Portugal de l'ouest de la France ne sont pas réputés pour la présence de Sarracenia, j'ai essayé autre chose : Ne disposant plus de place sur le balcon familial (que je remercie sincèrement au passage pour leur très grande patience malgré l'envahissement, les inondations, les pots qui se renversent toujours au dessus de la moquette, l'eau de pluie à récolter et stocker...), je me suis attaqué à la rambarde du balcon que j'avais bêtement négligée jusqu'à maintenant. Une petite descente dans une jardinerie pour investir dans une jardinière standard et son support et c'est parti. Le fond de la jardinière (que j'ai choisi sans trou) est rempli de gravier de drainage sur une hauteur d'une douzaine de centimètres. Cette grassette semblant apprécier la tourbe, j'ai mélangé 75% de tourbe acide de sphaigne avec 25% de sable (50% Loire, 50% Fontainebleau). J'ai en plus intimement mêlé de la sphaigne vivante au compost. Un indicateur de niveau me permet de plus de connaître le niveau d'eau contenu dans la jardinière. Pour simuler les pieds de Sarracenias, j'ai semé du gazon. Il ne manquait plus que les plantes. J'ai reçu depuis la très célèbre pépinière du sud-ouest, deux splendides pieds et j'avais commandé des graines depuis l'Angleterre. J'ai installé le tout sur le balcon orienté plein Est et rempli la réserve d'eau de la jardinière jusqu'à affleurer la surface et surprise... Les pieds adultes se portent à merveille, érigent de magnifiques hampes florales, des capsules de graines pleines à craquer. Concernant mon semis, il y a actuellement dans la jardinière une bonne cinquantaine de jeunes grassettes de 0.5 cm de diamètre. Les gaines issues des plants adultes ont aussi été semées dès l'éclatement des capsules et des grassettes de 0.1cm attendent le printemps. Chaque grassette cherche à pousser entre les herbes et la sphaigne qui ont tendance à devenir envahissantes. Il y a encore du jardinage dans l'air ! Si tout se passe bien, la saison de pousse à venir devrait permettre une abondante production de graines dont je ne manquerais pas de faire profiter la bourse de graines de DIONEE.


DIONÉE 40 - 1998