Le Brésil, paradis pour carnivorophile ! (2ème partie) Fernando RIVADAVIA
(Traduction et mise en forme de différents écrits de l'auteur par E. Partrat)
Etat de Minas Geraes
Pendant que j'étais à Chapada dos Veadeiros (= CV), mon ami
Mauricio est venu à Diamantina, une ville située dans le centre nord de
l'état de Minas Geraes. C'est un lieu très riche en plantes carnivores et
j'y suis allé une seule fois en 92. Un autre de mes amis, Thomas C. a
visité cette région en 85 et m'avait envoyé une photo de ce qui était
sûrement une nouvelle sous-espèce de D. villosa et qu'il avait trouvé
là-bas. En 92, les Droséras que j'avais pu y rencontrer étaient D.
graminifolia, D. hirtella, D. montana et D.communis. Quand Mauricio
m'a appelé et annoncé qu'Il avait trouvé là-bas des D. villosa, j'étais sur
qu'il ne pouvait s'agir que des plantes de Thomas. Mais à ma grande
surprise, ils étaient pratiquement identiques à celles trouvées
communément partout au Sud sud-est du Brésil ! Il n'y avait pas
d'hampes florales, de fleurs ou de graines, ce qui nous laisse encore
une chance pour que ces Drosera villosa soient vraiment différents. La
seule véritable différence que j'ai pu observer était que les stipules
étaient rouges sombres, pas transparents et légèrement plus larges. Je
n'avais jamais fait attention à ce détail auparavant, mais je crois que
c'est purement du à un facteur écologique.
Etat de Parana
Je suis retourné à CV le 1 8 avril et le 20 avril, j'étais sur le
départ pour un voyage à travers l'intérieur de I'état de Parana (= PR.)
avec un autre carnivorophile (et biologiste) de la ville de Londrina
appelé Dennis ainsi qu'un de ses amis d'université. Je suis parti jeudi
après-midi en voiture et je suis arrivé à Curitiba (à Parana) en soirée,
où j'ai rencontré un autre amateur de plantes carnivores (et lui aussi
biologiste) que je ne connaissais que par l'intermédiaire de lettres et
surnommé Dayse. Nous avons passé quelques heures à discuter et puis,
dans la matinée, j'ai récupéré les deux autres personnes de Londrina, à
la station de bus. Nous avons commencé alors notre périple à travers
l'état de Parana. Mon objectif principal était de voir D. brevifolia dans
la nature. La dernière des espèces endémiques connues et que je
n'avais pas encore rencontré dans la nature. Ce rêve a été pleinement
satisfait dès le premier endroit où nous nous sommes arrêtés, à une
altitude voisine de 1 1 00m, où elles poussaient sur des talus humides
tout à coté de la route. Ce que je sais, c'est que cette plante annuelle
pousse du Nord de I'Uruguay et à Parana puis, fait un gigantesque saut
jusqu'au Mexique, le sud-est des Etats-Unis et je pense aussi pousse à
Cuba. J'espère que des analyses poussées permettront de séparer ces
deux populations éloignées en deux ssp. différentes.
Au même endroit, nous avons trouvé un parterre de D. communis
ssp. « type(?)» et un autre parterre de D. ssp. « géant vert » (ou ssp.
« Hulk » comme Dennis les surnomme). Poursuivant au Nord-Ouest, nous
avons trouvé d'avantage de D. brevifolia et un peu plus tard, en
cherchant autour de la rivière Papagaio, nous avons retrouvé ces
mêmes Drosera mais aussi, D. villosa et D. montana var. «dewy scape»
(« hampe humide ») ! Les D. villosa étaient vraiment très gracieuses,
autant que cette espèce puisse l'être dans des conditions appropriées.
En fait, je m'attendais un peu à trouver D. montana var. « dewy scape »
dans cette région. Je sais aussi qu'elle pousse au Sud de l'état de
Santa Catarina et peut être aussi, à Rio Grande do Sul aussi C'est la
seule variété de Drosera qui s'étend sur tout le sud du Brésil. Les deux
formes de D. communis étaient très nombreuses dans ce site et en
cherchant avec plus de précautions, je pouvais discerner quelques
hybrides parmi eux. Plus au NO, nous avons traversé la rivière Tibaji
qui forme un petit et très joli canyon. A proximité, nous avons trouvé
D. communis ssp. « type(?)», D. villosa et D. brevifolia. Nous avons
achevé ce premier jour à Vila Velha, un parc naturel comportant de
fantastiques sculptures naturelles rocheuses à une altitude de 800m.
C'est là que nous avons campé.
Le jour suivant, nous avons tout d'abord passé par un endroit
appelé Furnas, où il y a quelques gouffres géants dans le sol, profonds
de plus de 50m et créés par d'anciennes excavations dans des cavernes
souterraines. Cela vaut le détour ! Plus au NO, à P. Grossa, nous nous
sommes dirigés vers le NE et avons conduits en direction de Castro
où, nous avons changé de direction et nous nous sommes dirigés vers
le NO à nouveau, conduit encore 50km jusqu'au canyon de Guartela sur
la rivière Iapo. C'est un lieu très joli que j'avais souhaité visiter depuis
longtemps. Cette fois, nous étions arrivés et nous préparions à
déjeuner. Il était déjà tard et nous disposions que de quelques heures
de soleil pour rechercher des plantes carnivores. Nous avions des jours
typiques d'automne, avec des nuits fraîches ( presque gelées) et des
journées ensoleillées et humides. La première nuit, j'ai dormi avec les
deux autres personnes dans une petite tente, mais après une longue
nuit à les entendre ronfler, j'ai décidé qu'il était préférable de geler
tout seul dans ma voiture. De toute façon, au canyon de Guartela, nous
n'avons trouvé qu'un petit nombre du même Drosera. D. villosa a été
seulement rencontrée dans un seul site près d'un torrent, où elles
étaient un peu plus nombreuses. elles poussaient dans un habitat
ombragé, en dessous d'une saillie rocheuse et même, sur des racines et
des mousses pendants de cette saillie et plongeant dans l'eau. elles
avaient un tout petit peu ou pas du tout de coloration rouge et même,
formaient de courtes tiges sans doute comme conséquence de cet
habitat très particulier. J'avais observé quelque chose de similaire au
NE du Brésil, où D. villosa ssp. « Bahia » poussait sur les parois d'un
canyon, à Chapada Diamantina dans l'état de Bahia.
Après le déjeuner du troisième jour, nous sommes retournés à
Castro et nous avons continué au NO de Pirai Do Sul à Jaguariaiva. J'y
ai laissé mes deux amis (qui devaient retourner à Londrina) et nous y
avons passé la nuit. Nous avons seulement trouvé un seul site à plantes
carnivores cet après-midi, près de Jaguariaiva, à l'endroit où la route
coupe une colline et avec de l'eau s'infiltrant entre les rochers. D.
communis et D. montana var. «dewy scape» sont les deux espèces que
nous avons rencontrées. En passant par Pirai do Sul hier, j'étais dans un
territoire familier. Je suis en effet passé par cette route l'an dernier en
allant à Londrina, mais je devais être tellement pressé que je ne
m'étais seulement arrêté que pour jeter un rapide coup d'oeil sur deux
sites propices. Un sur la rivière Cajuru ( qui sépare les comtés de
Jaguariaiva et de Senges) et l'autre, sur la rivière Funil dans le comté
de Senges (où je pensais avoir trouvé D. sp. «Emas » x D. ssp. «géant
vert » en 93). Ainsi, je me suis réveillé ce quatrième jour à Jaguariaiva
avec ces deux sites en mémoire. Je me suis arrêté sur deux autres
sites où j'ai trouvé les deux formes de D. communis, avant d'arriver à
la rivière Cajuru, où j'avais vu D. ssp. «géant vert» et D. sp. «Emas »
l'an dernier. Cette fois j'ai aussi trouvé D. communis ssp. « type(?)».
Drosera sp. «Emas » était l'espèce la plus abondante, recouvrant des
sillons humides à proximité de la route et plus loin en descendant vers
la rivière, recouvrant des rochers saillants et suintant d'eau sur les
berges. J'ai trouvé quelques Droseras portants des fleurs légèrement
violet-lilas comme à CV et beaucoup qui portaient encore de vieilles
hampes. C'étaient les premières Droséras en fleurs que j'ai pu trouver
pendant ce voyage. Aucun des D.villosa et D.montana même, n'avaient
d'hampes florales fraîches.
Mon prochain arrêt était la rivière Funil, où j'ai vu D. sp. «Emas »
pour la seconde fois dans la nature et pu découvrir qu'Il poussait si au
sud. En 94, j'étais déjà fortement suspicieux que D. communis et D. sp.
«Emas» ne puisse s'hybrider. Ma seconde visite sur le chemin de
Londrina m'a pratiquement confirmé mes suspicions et cette fois, j'étais
sur que les hybrides possibles étaient D. communis ssp. «type(?)» et
non un croisement entre D. sp. «Emas » et D. ssp. «géant vert ». La
principale surprise cette fois vint d'une partie du torrent que je n'avais
pas encore exploré. Ce sont les rochers bordant le torrent qui ont
attiré mon intention, me rappelant le site de D. villosa au canyon de
Guartela. Des D. villosa poussaient dans une semi-ombre, sur des
racines pendantes et des mousses trempant dans l'eau, en hissant des
hampes florales de 13cm de longueur!. Cinq kilomètres après la rivière
Funil, j'ai traversé l'état de Sao Paulo et le comté d'Itarare. Un peu
plus tard, j'ai stoppé sur la rivière Verde ( séparant les comtés d'Itarare
et Itabera), qui serpente à travers des collines de grès couvertes d'une
végétation de savane brésilienne (cerrado) et forme un petit canyon.
Des zones d'infiltration recouvertes par de l'herbe séparent la savane et
les berges du lit de la rivière. Drosera villosa scintille à I'endroit où
l'herbe rencontre les roches, souvent groupées sur des petits îlots de
végétation et très joliment colorées en rouge.
A mon grand désespoir, D. villosa pousse de façon caractéristique
en de petites colonies qui sont habituellement difficiles à trouver. Ceci
est vrai pour tous les sites que j'ai pu voir et pour toutes les variétés
de D. villosa, avec quelques exceptions. J'ai seulement trouvé quelques
colonies étendues mais je ne l'ai jamais trouvée poussant abondamment
dans aucune zone particulière, comme D. communis et D. montana,
avec sites après sites, toujours tous pleins de plantes. Drosera villosa
occupe de petits sites, souvent sans suivre un support de façon
préférentiel, ou au moins, aucun que je ne puisse identifier de façon
certaine. La rivière Verde a été en partie une exception car il y avait
d'abondants D. villosa poussant en s'étendant sur une petite zone
seulement. Etrangement, les autres Drosera n'étaient pas aussi
abondantes ici et n'étaient pas différentes de celles des autres berges
visitées pendant ce voyage. J'y ai trouvé les deux formes de D.
communis et D. sp. «Emas». En fait, c'était la première fois que j'ai vu
ce dernier dans l'état de Sao Paulo. Même si je suis sur qu'il y pousse,
comme à Senges qui est seulement à 5 km de la frontière, je ne l'ai
pas encore vu. J'étais surpris de ne pas trouver D. sp. « Emas » plus
étendu au Sud à Parana, sachant que nous avons croisé quelques sites
le long du chemin qui semblaient pourtant appropriés pour cette
espèce. Je pense de toute façon que la limite Senges/Jaguariaiva est
I'extrême limite sud pour cette espèce.
Pendant tout ce voyage, j'ai vu nombre de Genlisea repens mais
malheureusement, pas de G. aurea. J'ai rencontré G. aurea à la rivière
Funil en 93 mais quand j'y suis retourné l'an dernier, je n'en ai plus vu
qu'un seul exemplaire. Cette année, je n'en ai plus vu. Je suppose que
la raison principale vient du fait que beaucoup trop de visiteurs
s'arrêtent dans ce lieu pendant les journées chaudes pour s'y rafraîchir
car c'est un bel endroit. Je savais que G. aurea poussait au Sud de
Santa Catarina et j'espérais découvrir quelques sites de plus à Parana
mais apparemment, ce n'est pas une espèce très commune au Brésil
Sud. Les quelques Utriculaires rencontrées sur le chemin étaient U.
nana, U. triloba, U. subulata, U. tricolor (sans fleurs), U. nervosa et U.
reniformis. Toutes étaient assez communes, exceptées les deux
dernières espèces qui n'ont été trouvées chacune que dans deux sites.
J'étais surpris de trouver U. reniformis poussant si loin dans les terres.
Les feuilles étaient toutes très petites et je l'ai vu poussant en
compagnie de D. sp. « Emas » à la rivière Cajuru et en compagnie de
D. villosa à la rivière Funil.
Je savais que U. laxa et U. gibba poussaient à la rivière Funil mais
aucune des deux espèces n'étaient en fleurs. J'ai oublié de dire que je
me suis arrêté dans un site à Itararé où j'avais trouvé une grande
forme d'U. pusilla en 93. Elles étaient en pleine floraison avec des
hampes qui produisaient une substance gluante apparemment à l'axe du
pédicelle. Cela ressemblait à un mucilage de Drosera mais en plus
visqueux. Je me rappelle que I'on avait mentionné ceci dans « News et
Views » dans Carnivorous Plants Newsletter il y a quelques années et
que U. subulata produisait cette substance sur ces feuilles aussi.
J'ai oublié de mentionner que Dennis m'a apporté une Utriculaire
qu'Il avait collectée sur la côte de Parana qui s'est révélée être U.
erectiflora et qui n'a jamais été collectée dans cet Etat, d'après Taylor.
Cette espèce appartient à la section des Oligocista, qui contient
quelques autres espèces originaires du Brésil: U. laxa, U. adpressa, U.
meyeri et U. lloydii Jusqu'à l'an dernier, la seule espèce de ce groupe
que j'ai pu voir (morte ou vivante) était U. laxa, qui m'a été rapportée
du sud Brésil et qui a été trouvé dans la nature à Senges. Mon ami
Marcos et moi-même avons découvert U. lloydii, au sud de Cuiaba en
début d'année dernière. Quelques mois auparavant, un de mes amis m'a
rapporté U. meyeri de I'Ouest de Goias, et puis à CV, j'ai découvert U.
adpressa. Ainsi, avec l'Utricularia erectiflora que Dennis m'a rapporté
de Parana, j'ai maintenant fait le tour de tout ce petit groupe d'étrange
(et plutôt semblables) espèces à fleurs jaunes. Je n'ai pas vu U.
erectiflora et U. meyeri personnellement dans la nature, mais en tout
cas, je les ai au moins vu. D'après ce que j'ai observé, U. laxa et U.
erectiflora sont des espèces vivaces tandis que U. adpressa, U. lloydii et
U. meyeri sont des espèces annuelles.
Avant ce voyage, le site le plus au Nord de D. brevifolia que je
connaissais au Brésil (par l'intermédiaire d'un herbier) était sur la cote
de Parana mais il a fallu y ajouter notre collection du canyon Guartela.
Mon ami Linilson est allé à un voyage au parc national Bocaina situé à
la frontière des états de Sao Paulo et Rio de Janeiro. et parmi les D.
villosa et D. montana var « d.s.» qu'il a rapporté. j'ai trouvé D
brevifolia !!. C'est sur un site à peu près au NE du canyon Guartela,
seulement à 200km un peu plus loin au Nord. Ainsi. c'est le premier
site à D. brevifolia que je connais pour la région de Sao Paulo et qui
confirme pratiquement, que cette espèce atteint la région de Rio de
Janeiro.
DIONÉE 37 - 1997
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