VERS UNE ALIMENTATION PLUS SAINE POUR NOS PLANTES A URNES (Cyril Saguez)
La vie de nos chères petites est loin d'être "un long fleuve
tranquille", aussi, pour remédier à certains problèmes de culture,
est-il parfois nécessaire de les nourrir.
les nourrissages se font le plus souvent avec des mixtures dignes de
Merlin l'enchanteur à base de jus de viande, d'oeuf ou encore de sang, qui ne vont
pas sans poser de petits problèmes phytosanitaires. En effet, ces procédés favorisent
l'apparition assez fréquente de mauvaises odeurs et, ce qui est plus grave, de
moisissures pouvant entraîner de nombreux désagréments. Ces moisissures doivent ensuite
être éliminées à grands renforts de fongicides, produits contenant souvent du cuivre,
toxique pour le champignon mais mortel pour certaines de nos protégées (ex. :
Heliamphora...).
Les utilisateurs de tels procédés n'ont, tout de même, pas
tout-à-fait tort. En effet, ces mélanges ont la particularité d'être riches en
protéines phosphorylées et soufrées... Celles-ci vont être hydrolysées sous l'action
des enzymes de la plante ( Sarracenia, Cephalotus, Népenthes...), mais aussi d'enzymes
bactériennes (Sarracenia purpurea, Darlingtonia californica, Brocchinia reducta ...) en
de petites molécules que la plante va ensuite pouvoir absorber : les acides aminés...
Les acides aminés sont les unités de base, les briques permettant la construction de ces
édifices que sont les protéines. Ils sont au nombre de 20 auxquels il faut ajouter une
multitude de dérivés entrant ou non dans la composition des protéines. Ces molécules
sont l'engrais de la plante carnivore, elles lui apportent des précurseurs hormonaux
(tryptophane, ...), l'azote directement utilisable, ainsi qu'une partie du phosphore
(phosphoryl sérine) et du soufre (cystéine, cystine et méthionine). L'azote non
assimilable directement et la partie restante du phosphore et du soufre sont apportés par
d'autres molécules plus complexes (vitamines, acides nucléiques, ...) ou directement
sous forme ionique (1)
(NH4+ , HPO42-,
SO42-...)
Arrêtons là ces explications un peu rébarbatives pour entrer dans le
vif du sujet ! Il doit bien exister, de par le monde, une substance qui a les avantages du
jus de viande sans les inconvénients ! C'est ce que je me suis mis en quête de
découvrir !
Après quelques essais infructueux, je me suis intéressé à l'extrait
de levure, un composé très utilisé en microbiologie pour sa richesse en acides aminés,
vitamines et autres facteurs de croissance. Ses avantages étaient nombreux : pas d'odeurs
après quelques jours, phénomène d'indigestion rare, conservation facile, etc ..., mais,
comme pour le jus de viande, il avait le grand inconvénient de provoquer l'apparition de
moisissures. Ce problème était dû, je pense, à une trop forte concentration en
macromolécules (glycogène, protéines, polyphosphates, ...) qui faute de ne pouvoir
être utilisées directement par la plante s'accumulaient et finissaient par former un
substrat propice au développement des moisissures. Diverses techniques pouvaient être
utilisées pour "éliminer" ces molécules, mais une seule, ne modifiant pas les
caractéristiques principales du produit, a retenu mon attention : l'hydrolyse enzymatique
à la pancréatine. La pancréatine est une poudre beige, tirée du pancréas de boeuf
ou de porc et vendue en pharmacie. Elle contient de nombreuses enzymes capables de
"transformer" les protéines en acides aminés (protéases, peptidases, ...) et
le glycogène en maltose (2) (amylase), molécules simples donc facilement
assimilables.
Effectivement, après ce traitement, les attaques de champignons
devinrent rares ... De par sa facilité de conservation et d'utilisation et ses nombreuses
propriétés, ce milieu devrait rencontrer un vif succès auprès des membres de notre
association ayant des problèmes de culture avec leurs plantes à urnes.
Préparation :Dans un flacon d'une contenance d'environ 150ml (bouteille de sirop par exemple), introduire :
Mélanger.
Laisser reposer deux heures.
Porter à ébullition puis laisser refroidir jusqu'à 30 - 35°C environ.
Ajouter alors une demi cuillère à café rase de pancréatine et maintenir
(3)
l'ensemble entre 30 et 35°C pendant deux à trois heures.
Porter de nouveau à ébullition, bien fermer le bouchon et stocker au froid.
Utilisation :Pour introduire ce mélange dans les urnes, j'utilise une seringue de 2ml munie de son aiguille. Les doses dépendent de la plante et de l'âge de celle-ci :
Bibliographie :
De nombreux ouvrages traitent des modes de capture et de digestion
utilisés par les plantes carnivores, aussi, cette bibliographie ne sera pas exhaustive.
En voici quelques-uns :
DIONÉE 30 - 1993
(1)
l'absorption de sels minéraux a été mise en évidence
indirectement par T. Ashley et J.F. Gennaro en 1971 lors de leurs études du processus de
digestion et d'assimilation de Drosera rotundifolia.
(2)
Le maltose est un dimère du glucose très facilement
assimilé par les bactéries présentes dans l'urne.
(3)
Pour maintenir le flacon à 30-35°C, il suffit de le
placer dans une boîte de polystyrène contenant de l'eau à 35°C et fermée par un
couvercle.
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