Notre ami anglais Victor SMYTH étant venu, avec sa famille,
passer quelques jours de vacances en France, nous avons eu le très
grand plaisir de converser avec lui sur nos plantes favorites, en
particulier les droséras tubéreux dont ce "C.P enthusiast" cultive
avec succès quelque soixante espèces, sous-espèces, formes et variétés !
Voici quelques-uns de ces propos où Vic éclaire certains aspects de
cette culture.
Une condition majeure de réussite est le respect du cycle
biologique de ces plantes. Pour cela, il est nécessaire de connaître
les conditions édaphiques et climatiques du pays d'origine. Pour leur
quasi-totalité, les droséras tubéreux sont des endémiques du "coin"
sud-ouest de l'Australie. Vic nous précise les données climatiques de
cette région. Elles correspondent à un climat de type méditerranéen
avec évidemment, une inversion des saisons par rapport à notre
hémisphère. La moyenne des pluies est de 500 à 700mm de mai à
octobre, période de végétation active des droséras tubéreux, et la
température moyenne de juillet (mois le plus "froid") est de 10 degrés
centigrades. Pour cette même région, la moyenne des pluies de novembre
à avril (période de dormance) est au-dessous de 120 mm, les
températures de janvier se situant entre 21 et 27 degrés. Au fort de
l'été, des tubercules (au repos) au-dessus d'affleurements
granitiques subissent des températures de 40 degrés pendant de longues
périodes.
En culture dans nos régions d'Europe, c'est au cours de l'été que
la plupart des droséras tubéreux flétrissent et que les tubercules
entrent en période de repos. Vic les laisse alors en pot, au sec. Le
compost est maintenu légèrement humide pour quelques espèces
(D.auriculata, D.peltata, D.menziesii, D gigantea,
D. sulphurea ) qui, à l'état naturel, poussent en sols peu drainés.
Le problème de la mise au régime sec se complique parfois quand la
plante mère, entrant en période de repos, est accompagnée de jeunes
plantes (issues de tubercules secondaires) encore en végétation
active. Vic a observé ce cas entre autres espèces, chez Drosera
macrantha. Il a alors prolongé l'humidification du compost - la
période de végétation atteignant neuf mois - et quand, ayant laissé
sécher la potée, il en a examiné le contenu, il a dénombré trois
tubercules adultes et huit petits !
On conseille quelquefois de placer les tubercules à l'état
dormant, dans des sachets plastiques bien clos, procédé qui facilite
évidemment l'observation de l'état du tubercule et du départ de la
végétation. Vic objecte à cette méthode deux inconvénients:
Le fait que les droséras tubéreux en culture soient encore à
l'état dormant pendant notre saison froide ne semble pas contrarier la
reprise de végétation. Vic a observé que beaucoup de tubercules
amorcent la croissance dès avant Noël et développent lentement leurs
pousses à mesure que s'annonce une saison plus favorable. Vic
conseille de ne pas trop humidifier les plantes pendant cette phase
délicate à moins que l'on ne dispose d'une serre chauffée. Il arrive
qu'au printemps des tubercules tardent à former leurs pousses. Il faut
alors se garder d'arroser à l'excès, ce qui pourrait être fatal aux
plantes. Avec ou sans arrosage, la croissance reprendra. "Le tubercule
sait ce qu'il veut" affirme Vic, qui ajoute, qu'en certains cas,
l'état de dormance se prolonge jusqu'à la saison suivante. "Je laisse
les plantes pousser au moment où elles le veulent, et ainsi nous
faisons bon ménage".
Vic cultive ces droséras en compost très poreux: sable mélangé ou
non d'un peu de tourbe. Ce milieu ingrat impose de nourrir les
plantes:
La production de tubercules secondaires, dans de bonnes conditions de
culture, permet une multiplication aisée des droséras tubéreux. Le
semis demande beaucoup de patience, certaines graines ne germant qu'au
bout de deux ou trois années, parfois davantage !
Mais quelques semaines suffisent, en général, pour voir lever les
graines fraîches de Drosera peltata et D. auriculata, espèces de
culture aisée et d'aspect très semblable que Vic nous a appris à
distinguer: D. peltata, souvent plus ramifiée que D. auriculata, a
des sépales légèrement velus alors que ceux de D.auriculata sont
glabres. Vic sème les graines sur un compost de sable et tourbe en
parts égales dans un pot de 15 cm et aussi profond que possible.
Plonger le pot dans l'eau de telle sorte que le niveau de celle-ci
soit à 3 pouces (7,5 cm) de la surface du compost. Autant de lumière
et de chaleur que possible. Résultat: 80% de germination pour ces
deux espèces...
La place nous manque pour rapporter ici tous les propos de Victor
illustrés par de superbes photos... Voici l'une d'entre elles,
D. erythrorhiza ssp.squamosa, développant sa rosette étincelante.
Nous pouvons compter sur l'extrême gentillesse de Vic pour
collaborer à d'autres épisodes de cette "tuberous story".
DOCUMENTATION
Sur le même sujet voir les articles de J. Haldi (Dionée 4) et de
S. Lavayssière (Dionée 15).
Description approfondie des droséras tubéreux dans le livre d'Allen
Lowrie: Carnivorous plants of Australia vol 1.
DIONÉE 17 - 1989
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