LA MULTIPLICATION DE PINGUICULA (D. MORENO, Ph. BIZOUARD)
La reproduction du genre PINGUICULA passe pour assez aisée. Nous
examinerons dans ce dossier toutes les possibilités de multiplication que nous
connaissons et que nous avons pu tester.
Commençons par la pollinisation : les organes reproducteurs se
trouvent difficilement, ce qui explique un grand nombre d'échecs. Il faut prendre une
épingle à tête et une loupe à fort grossissement. Passez la tête de l'épingle
sous le petit opercule afin de trouver les deux anthères, puis, remonter l'épingle
délicatement; il faut alors vérifier à la loupe que le pollen est bien accroché, il
suffit de le déposer à l'entrée du stigmate (voir croquis). Pour plus de sécurité une
dernière opération sera tentée le lendemain. Une réussite parfaite ne peut avoir
lieu que si la plante est un bonne forme.
LES SEMIS :
J'ai été très déçu par les semis. Une grande
quantité de graines semées ne donnent que peu de résultats, quelques plantules tout au
plus. A la suite d'une observation de Ph. BIZOUARD, il apparaît qu'une grande partie des
graines sont infectées par une prolifération mycosique qui trouve son origine dans
l'enveloppe fibreuse de la graine. Ce qui anéantit bien des chances de réussite. Pour
remédier à cet inconvénient, il faudrait désinfecter les graines dès leur récolte
dans de l'hypochlorite de calcium. Je teste actuellement un système qui consiste à faire
le vide dans un bocal où les graines sont trempées dans un désinfectant.
LA DIVISION DE TOUFFE :
Lorsque la plante a fleuri, nous pouvons
remarquer, au bout de quelque temps, qu'un nouveau petit coeur se forme. Il faut
attendre qu'il soit bien formé avant de diviser la plante. Je profite de ce moment-là
pour renouveler le compost de toute la plante, en essayant de nouveaux mélanges. Par ce
moyen, peut-être que le milieu idéal pour chaque plante pourra être trouvé. Mais,
l'adaptation est très grande. Un exemple : Pinguicula gypsicola, placé dans du sphagnum
saturé d'humidité, à 25 degrés centigrades forme sa rosette d'hiver en même temps que
sa soeur qui, elle, est placée dans un mélange de tourbe et sable à une
température d'environ 10 degrés, l'éclairage étant le même.
LES BOUTURES DE FEUILLES :
Nous verrons dans l'article suivant
une façon plus performante, que je n'ai pas eu le temps de tester mais dont j'ai pu
constater les résultats.
Si la plante est en bonne forme, je procède au bouturage de feuille à
tout moment de l'année, mais la meilleure époque se trouve être au printemps. Il suffit
de détacher délicatement une feuille et de la déposer sur de la tourbe ou sur du
sphagnum. C'est sur sphagnum que j'ai obtenu les meilleurs résultats. Si la feuille n'a
pas été lésée lors du retrait de la plante mère, le premier bourgeon apparaît après
environ 15 jours. Il ne reste plus qu'à la laisser grandir, après l'avoir transplantée.
Cette nouvelle plantule demandera environ un an pour fournir une fleur et être capable de
donner des boutures.
PROCEDURE DE BOUTURAGE :Qu'il s'agisse d'obtenir des boutures ou de prélever des méristèmes, la procédure est la mène, seulement les méristèmes sont prélevés avant d'être visibles à l'oeil nu, tandis que pour les boutures on les laisse se différencier sur place jusqu'à obtention d'une plantule.
La même feuille peut redonner à plusieurs reprises de nouveaux
méristèmes, si on les prélève dès qu'ils ont apparu (levée de l'inhibition)
Au bout de 8 jours les premiers méristèmes apparaissent. Huit jours
plus tard, les ébauches de plantules sont visibles à l'oeil nu. Environ 10 % des
feuilles ne donnent rien. La zone critique est la tranche de cassure de la feuille ; si
une altération, même minime, survient il n'y aura pas de prolifération de méristèmes
(voir croquis). Le bas des feuilles reste indemne au bout de 15 jours de tout
noircissement et de toute pourriture.
Lorsqu'on place les feuilles sur milieu gélosé, les méristèmes
apparaissent en 24 heures, mais les risques d'infection augmentent beaucoup. Les deux
manières peuvent se conjuguer.
LA METHODE IN-VITRO :
La culture in vitro n'est pas un super moyen de
multiplication, mais un moyen de plus à des fins de productivité, qui ne dispense pas du
tout d'étudier les autres.
Les méristèmes commencent à se développer au bout de 49 heures. A
la différence des graines, ils sont pratiquement indemnes de toute contamination. Il faut
les prélever avant qu'il n'existe une ébauche de feuille, sinon la réussite est moins
sûre et les chances d'infection augmentent.
Par contre plus l'explant est petit, plus les "décès" sont
nombreux. Il faut faire un compromis. Nos prélèvements se situent entre 0,1 et 0,12 mm.
On opère au microscope, grossissement 40 à 50 fois.
Les méristèmes prélevés sont placés sur un milieu gèlosé. Nous
avons utilisé le milieu de Cirall (1983) pour les macro-éléments et celui de Monnier
pour les micro-éléments. En voici la composition:
La plantule développée sera repiquée sur le milieu dilué de moitié et sans Benzil
aminopurine, ou sur milieu de Thomal (DIONÉE 15) avec adjonction d'acides aminés.
On peut aussi repiquer les feuilles qui donneront alors d'autres plantules. On double
ou triple assez vite le nombre initial. Ce repiquage s'effectue alors sur le même milieu.
La sortie des tubes s'effectue sans problème. Les plantules sont posées sur argile
expansé en milieu chaud et humide, en hydro-culture (DIONÉE N°14).
DIONÉE 16 - 1989
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